Publié le 18 mars 2024

Contrairement à une idée reçue, accumuler des données sur vos campagnes e-mailing ne garantit pas leur performance ; la clé est de comprendre leurs biais et leurs interdépendances.

  • Certains indicateurs comme le taux d’ouverture sont devenus des « KPIs zombies », des chiffres trompeurs qui masquent la réalité.
  • Le véritable retour sur investissement (ROI) est souvent sous-estimé car il omet des coûts cachés cruciaux comme le temps humain et l’acquisition des contacts.

Recommandation : Abandonnez l’analyse en silo de chaque KPI et adoptez une approche diagnostique en entonnoir, du technique (délivrabilité) au business (conversion), en enrichissant systématiquement le quantitatif par le qualitatif.

Pour tout marketeur, le tableau de bord d’une campagne e-mailing est une mosaïque de chiffres : taux d’ouverture, taux de clic, taux de conversion… Ces indicateurs de performance, ou KPIs (Key Performance Indicators), sont la boussole supposée guider nos décisions. Nous passons des heures à les compiler, à les comparer, à les présenter en réunion. La croyance populaire veut que plus ces chiffres sont élevés, meilleure est la campagne. On se focalise sur l’optimisation de chaque métrique de manière isolée, espérant que l’addition des performances individuelles créera un succès global.

Pourtant, cette approche quantitative a ses limites. Elle ignore une partie essentielle de l’histoire : le « pourquoi » derrière les chiffres. Pourquoi ce pic de désabonnements après une campagne pourtant réussie en termes de clics ? Pourquoi ce taux de conversion stagne-t-il malgré un taux d’ouverture record ? La plupart des analyses s’arrêtent à la surface, se contentant de constater les faits sans en sonder les causes profondes. Cette obsession pour le chiffre brut nous rend aveugles aux signaux faibles, aux biais cachés et aux véritables leviers de croissance.

Cet article propose une rupture avec cette vision superficielle. La véritable maîtrise des KPIs ne réside pas dans leur simple suivi, mais dans la compréhension rigoureuse de ce que chaque métrique mesure réellement, de ses limites et de ses interactions avec les autres. Nous allons déconstruire chaque indicateur clé, non pas pour en donner une définition de plus, mais pour révéler ses secrets, ses pièges et son véritable potentiel analytique. Nous verrons que certains KPIs autrefois fiables sont devenus des « KPIs zombies » et que le calcul du ROI est souvent faussé par des oublis majeurs. L’objectif n’est pas de vous donner un dictionnaire, mais une grille de lecture stratégique pour transformer vos données en décisions éclairées.

Cet article est structuré pour vous guider pas à pas dans cette démarche analytique. Chaque section est dédiée à un aspect crucial de la performance e-mailing, des fondations qualitatives à l’interprétation fine de chaque KPI majeur, jusqu’au calcul rigoureux du retour sur investissement. Explorez ce guide pour passer du statut de collecteur de données à celui d’analyste stratégique.

Pourquoi vos KPIs ne racontent pas toute l’histoire : le guide de l’analyse qualitative

Les indicateurs quantitatifs sont essentiels, mais ils ne répondent qu’à la question « Quoi ? ». Pour comprendre le « Pourquoi ? », une analyse qualitative est indispensable. Un taux de clic élevé est une bonne nouvelle, mais que se passe-t-il si les cliqueurs sont déçus par la page de destination ? Un faible taux de désabonnement peut sembler positif, mais cache-t-il une audience passive et désengagée qui ignore simplement vos messages ? Le signal qualitatif est le complément nécessaire pour donner du sens à vos métriques.

L’analyse qualitative consiste à collecter et interpréter des données non numériques pour comprendre les motivations, les perceptions et les comportements de votre audience. Cela inclut l’analyse des réponses directes à vos campagnes, les commentaires laissés sur les formulaires de désinscription, ou encore les résultats de micro-sondages intégrés à vos e-mails. Cette approche humanise vos données et révèle des insights qu’aucun chiffre ne pourra jamais fournir. Elle permet de diagnostiquer précisément les points de friction et les opportunités d’amélioration.

Étude de cas : corréler données quantitatives et qualitatives

Une entreprise B2B a observé un pic de désabonnements suite à une campagne produit (donnée quantitative). En analysant les commentaires du formulaire de désinscription (donnée qualitative), elle a découvert que 67% des désabonnés jugeaient le contenu trop technique. La solution a été de segmenter la base entre « experts » et « débutants », avec des messages adaptés à chaque profil. Les résultats ont été immédiats : le taux de désabonnement a chuté de 0,8% à 0,3% et le taux de réactivité a bondi de 45%.

Intégrer le qualitatif n’est pas complexe. Il s’agit de mettre en place des mécanismes d’écoute actifs. Les heatmaps (cartes de chaleur) de clics, par exemple, montrent où vos utilisateurs concentrent leur attention visuelle, révélant les éléments qui attirent vraiment leur intérêt au-delà du simple clic final. En combinant ces informations avec des sondages post-clic, vous obtenez une vision complète du parcours utilisateur.

En fin de compte, l’analyse qualitative transforme un rapport de chiffres froids en une conversation avec votre audience. C’est en écoutant activement que vous découvrirez les véritables leviers pour construire des campagnes plus pertinentes, plus engageantes et, in fine, plus rentables.

Taux de délivrabilité : que signifie vraiment ce chiffre et comment l’interpréter ?

Le taux de délivrabilité est le premier gardien de votre performance. C’est le pourcentage d’e-mails qui ont été acceptés par les serveurs de messagerie de vos destinataires. Un taux de délivrabilité faible signifie qu’une partie de vos messages n’atteint même pas sa cible, rendant toute autre analyse (ouverture, clic) caduque. Pourtant, ce KPI est souvent mal compris et confondu avec la « délivraison ».

Il est crucial de distinguer ces deux concepts. La délivraison (delivery) mesure le simple fait que l’e-mail n’a pas généré de « hard bounce » (erreur définitive, comme une adresse invalide). La délivrabilité (inbox placement) est beaucoup plus subtile : elle mesure la capacité de votre e-mail à arriver en boîte de réception principale, et non dans le dossier spam ou promotions. Une campagne peut avoir 99% de délivraison, mais si 20% de ces e-mails atterrissent en spam, sa délivrabilité réelle est bien plus faible. Selon les études sectorielles, un bon taux de délivrabilité se situe entre 98% et 98,5%, mais ce chiffre ne dit pas tout sur le placement en boîte de réception.

Le tableau suivant clarifie les différences fondamentales entre ces deux métriques souvent confondues.

Différences entre Délivraison et Délivrabilité
Critère Délivraison Délivrabilité
Définition Email accepté par le serveur destinataire Email arrivé en boîte de réception principale
Mesure 100% – taux de bounce Difficile à mesurer précisément
Impact Technique (serveur accepte) Business (utilisateur voit le message)
Facteurs clés Validité des adresses Réputation expéditeur, SPF/DKIM/DMARC

Pour optimiser votre délivrabilité, la clé est votre réputation d’expéditeur. Celle-ci est influencée par des facteurs techniques et comportementaux. Techniquement, il est impératif de configurer correctement les protocoles d’authentification comme SPF (Sender Policy Framework), DKIM (DomainKeys Identified Mail) et DMARC (Domain-based Message Authentication, Reporting, and Conformance). Ces protocoles prouvent aux fournisseurs d’accès à Internet (FAI) que vous êtes bien qui vous prétendez être.

Représentation visuelle abstraite des flux d'authentification email avec formes géométriques interconnectées

D’un point de vue comportemental, les FAI analysent l’engagement de vos destinataires. Des taux d’ouverture et de clic élevés, ainsi qu’un faible nombre de plaintes pour spam, envoient des signaux positifs qui renforcent votre réputation. À l’inverse, envoyer des messages à des contacts inactifs ou non consentants la dégradera rapidement.

En somme, ne vous contentez pas d’un bon taux de délivraison. Surveillez activement votre réputation, auditez votre configuration technique et maintenez une base de données propre et engagée. C’est la condition sine qua non pour que vos messages aient une chance d’être lus.

Taux de désabonnement : pourquoi un taux à 0% est un mauvais signe

Le taux de désabonnement, qui mesure le pourcentage de destinataires ayant cliqué sur le lien de désinscription, est souvent perçu avec crainte. L’instinct premier est de vouloir le réduire à tout prix, voire de viser le zéro. C’est une erreur d’analyse fondamentale. Un taux de désabonnement nul ou anormalement bas n’est pas le signe d’une audience parfaitement satisfaite, mais le symptôme probable d’un problème plus grave : un désengagement passif ou, pire, un processus de désinscription opaque.

Un taux de 0% peut signifier que vos e-mails ne sont tout simplement plus ouverts, et que vos contacts inactifs n’ont même plus l’énergie de se désinscrire. Ils deviennent des « adresses zombies » qui plombent vos statistiques d’engagement et nuisent à votre délivrabilité à long terme. Un certain niveau de désabonnement est sain ; il indique que votre processus de désinscription est clair et que vous purgez naturellement votre base des contacts pour qui votre contenu n’est plus pertinent. Cela vous permet de vous concentrer sur une audience réellement engagée et qualifiée.

Plutôt que de le craindre, il faut voir le désabonnement comme une source d’information précieuse. La page de désinscription est une opportunité unique d’obtenir un feedback honnête. En posant une question simple comme « Pourquoi partez-vous ? », vous pouvez recueillir des données qualitatives inestimables pour ajuster votre stratégie. Peut-être que la fréquence d’envoi est trop élevée, que les sujets ne sont plus pertinents, ou que les attentes initiales n’ont pas été comblées.

L’objectif n’est pas d’empêcher le départ, mais de le comprendre et de le gérer intelligemment. Un centre de préférences, par exemple, est une excellente alternative à la désinscription pure et simple. Il permet à l’utilisateur de personnaliser son expérience en choisissant les thématiques qui l’intéressent ou en réduisant la fréquence des envois. Vous transformez ainsi une intention de rupture en une opportunité de réajuster la relation.

Comment transformer le désabonnement en opportunité

  1. Créer un centre de préférences sur la page de désinscription pour permettre aux utilisateurs de choisir les types de contenus et la fréquence.
  2. Proposer des alternatives claires : par exemple, passer d’un envoi quotidien à un résumé hebdomadaire.
  3. Offrir un choix de thématiques pour que l’abonné puisse personnaliser les sujets qu’il reçoit.
  4. Ajouter un questionnaire de départ rapide et optionnel pour collecter des données qualitatives sur les raisons du désengagement.
  5. Mettre en place une dernière campagne de réengagement ciblée pour les segments inactifs avant de les supprimer de la base.

En résumé, un taux de désabonnement sain (généralement inférieur à 0,5%) est le signe d’une base de données vivante et d’une relation transparente avec votre audience. C’est un filtre naturel qui améliore la qualité de vos contacts et la pertinence de vos futures campagnes.

Test A/B : comment le mettre en place correctement pour obtenir des résultats fiables

Le test A/B, ou split testing, est l’outil le plus puissant de l’arsenal d’un marketeur pour optimiser ses campagnes de manière itérative et basée sur des données. Le principe est simple : créer deux versions (A et B) d’un e-mail en ne modifiant qu’un seul élément (l’objet, le call-to-action, une image…), puis les envoyer à deux échantillons représentatifs de votre audience pour voir quelle version performe le mieux. Pourtant, malgré sa simplicité apparente, la majorité des tests A/B sont mal exécutés et conduisent à des conclusions erronées.

La rigueur méthodologique est la clé d’un test A/B fiable. L’erreur la plus fréquente est de tester plusieurs variables en même temps. Si vous changez à la fois l’objet et le bouton d’appel à l’action, vous ne saurez jamais lequel de ces deux changements est responsable de la variation de performance. La règle d’or est : un seul élément isolé par test. De plus, il est crucial de s’assurer que les échantillons A et B sont statistiquement identiques et suffisamment grands. Arrêter un test trop tôt, dès qu’une version prend une légère avance, est un biais de confirmation classique qui invalide les résultats. Il faut attendre d’atteindre la significativité statistique, généralement avec un minimum de 1000 contacts par variante et un niveau de confiance de 95%.

Diagramme visuel abstrait montrant deux chemins parallèles convergeant vers un point central

Pour maximiser l’impact de vos efforts, il faut prioriser les tests. Tous les éléments n’ont pas le même potentiel d’amélioration. Une étude sur des milliers de campagnes a établi une hiérarchie claire. Le segment ciblé est de loin l’élément le plus impactant (+47% d’amélioration en moyenne), suivi par l’objet de l’e-mail (+35%) et le timing d’envoi (+28%). Tester la couleur d’un bouton (+8%) a beaucoup moins d’impact que de tester une nouvelle proposition de valeur dans l’objet.

Voici un résumé des erreurs les plus courantes qui peuvent invalider la totalité de votre processus de test A/B.

Erreurs courantes qui invalident un test A/B
Erreur Conséquence Solution
Tester plusieurs variables simultanément Impossible d’identifier l’élément performant Isoler une seule variable par test
Arrêter trop tôt (biais de confirmation) Résultats non significatifs statistiquement Attendre d’avoir au moins 1000 contacts par variante et une confiance statistique suffisante.
Ignorer le timing d’envoi Biais lié au comportement temporel Tester sur le même jour et à la même heure pour les deux segments.
Échantillons non homogènes Comparaison biaisée S’assurer d’une randomisation stricte et aléatoire des segments.

Le test A/B n’est pas une baguette magique, mais un processus scientifique d’amélioration continue. En appliquant une méthodologie stricte, en priorisant vos tests et en documentant chaque résultat, vous construirez un savoir précieux et durable sur ce qui résonne vraiment avec votre audience.

Google Data Studio : le guide pour créer votre premier tableau de bord marketing

Mesurer les KPIs est une chose, les visualiser de manière claire et actionnable en est une autre. Google Data Studio (désormais Looker Studio) est un outil de datavisualisation gratuit et extrêmement puissant qui permet de transformer des feuilles de calcul brutes en tableaux de bord interactifs et esthétiques. Pour un analyste, c’est l’outil idéal pour centraliser les données de performance, suivre les tendances et communiquer les résultats aux parties prenantes de manière efficace.

Le principal avantage de Looker Studio est sa capacité à se connecter à une multitude de sources de données. Vous pouvez importer directement des fichiers CSV exportés depuis votre plateforme e-mailing, vous connecter via des API, ou même intégrer des données issues de Google Analytics pour une vision à 360 degrés du parcours utilisateur, du clic dans l’e-mail à la conversion sur le site. Une fois la source de données connectée, le travail consiste à définir vos dimensions (les axes d’analyse, comme la date ou le nom de la campagne) et vos métriques (les chiffres que vous mesurez, comme le taux d’ouverture ou les revenus générés).

La puissance de l’outil réside également dans sa capacité à créer des « champs calculés ». Vous pouvez ainsi créer vos propres KPIs qui ne sont pas disponibles nativement dans votre plateforme, comme le taux de réactivité (clics / ouvertures) ou un ROI complexe qui intègre plusieurs types de coûts. Cette flexibilité vous permet de construire un reporting sur-mesure, parfaitement aligné avec vos objectifs business. Pour un premier tableau de bord, il est recommandé de commencer par des visualisations simples mais efficaces : un graphique en série temporelle pour suivre l’évolution des KPIs clés, un entonnoir de conversion pour visualiser les déperditions, et une matrice pour comparer la performance des différentes campagnes.

D’ailleurs, pour ceux qui cherchent à accélérer le processus, il existe des ressources pour faciliter la prise en main. Comme le souligne le cabinet Cartelis dans une publication pour La Fabrique du Net, « un reporting de performance totalement gratuit est disponible en téléchargement pour créer rapidement vos premiers tableaux de bord ».

Étapes pour connecter vos données emailing à Looker Studio

  1. Exporter vos données de performance depuis votre plateforme e-mailing, idéalement au format CSV ou via un connecteur API.
  2. Dans Looker Studio, créer une nouvelle source de données en choisissant l’option « Importer un fichier » (pour le CSV) ou le connecteur adéquat.
  3. Configurer les types de champs : assurez-vous que les dates sont reconnues comme « Date », les noms de campagnes comme « Texte » et les métriques comme « Nombre ».
  4. Créer des champs calculés pour les métriques avancées comme le taux de réactivité (SUM(Clics) / SUM(Ouvertures)) ou le ROI.
  5. Concevoir vos visualisations : commencez par un entonnoir (Délivrabilité > Ouvertures > Clics > Conversions) et une courbe d’évolution temporelle.
  6. Configurer les filtres (par date, par campagne) pour rendre le tableau de bord interactif et automatiser l’envoi du rapport par e-mail.

En investissant du temps dans la création d’un tableau de bord pertinent, vous passez d’une analyse réactive (regarder les rapports passés) à un pilotage proactif de votre stratégie, capable d’identifier les tendances en temps réel et de prendre des décisions plus rapides et mieux informées.

Le guide pour lire et interpréter un rapport de campagne e-mailing

Ouvrir un rapport de campagne e-mailing peut être déroutant. Une multitude de chiffres s’affichent, et il est tentant de se focaliser sur un seul KPI, souvent le taux d’ouverture ou le taux de clic. C’est une approche parcellaire. L’interprétation d’un rapport doit être une démarche holistique et diagnostique, qui suit la logique de l’entonnoir de conversion de l’utilisateur : a-t-il reçu l’e-mail ? L’a-t-il ouvert ? A-t-il cliqué ? A-t-il converti ?

La première chose à faire est de contextualiser les chiffres. Un taux d’ouverture de 20% est-il bon ou mauvais ? Cela dépend de votre secteur d’activité, du type d’e-mail (newsletter vs promotionnel), et de votre performance historique. Comparez toujours vos résultats à vos propres benchmarks et à ceux de votre industrie. Ensuite, analysez les KPIs en séquence. Un bon taux d’ouverture mais un faible taux de clic signale un problème de pertinence du contenu ou un appel à l’action peu convaincant. Un bon taux de clic mais un faible taux de conversion pointe vers un problème sur la page de destination (landing page).

L’un des plus grands défis récents dans l’analyse est l’impact de la fonctionnalité Mail Privacy Protection (MPP) d’Apple. Depuis iOS 15, Apple pré-charge le contenu des e-mails, y compris les pixels de suivi, ce qui gonfle artificiellement les taux d’ouverture. En conséquence, le taux d’ouverture est devenu un « KPI zombie » : il semble vivant, mais il a perdu une grande partie de sa fiabilité pour les utilisateurs d’Apple Mail. Les analystes doivent donc se fier davantage à des métriques plus tangibles comme le taux de clic, le taux de réactivité (CTOR) et surtout le taux de conversion.

Méthode de l’entonnoir de diagnostic en 4 niveaux

Un e-commerçant analyse sa dernière campagne : 1) Délivrabilité à 96% (acceptable). 2) Taux d’ouverture à 18% (dans la moyenne). 3) Taux de clic à 2,5% (correct). Jusqu’ici, tout va bien. Mais, 4) Taux de conversion à 0,3% (très faible). Le problème ne vient pas de l’e-mail lui-même, mais de l’étape suivante. En analysant le trafic post-clic via Google Analytics, il découvre un taux de rebond de 85% sur la landing page. Le diagnostic est clair : la promesse de l’e-mail n’est pas tenue sur la page. La refonte de cette dernière a permis de multiplier la conversion par trois.

Plan d’action pour votre audit de performance e-mailing

  1. Points de diagnostic : lister tous les KPIs clés de votre entonnoir (Délivrabilité, Ouverture, Clic, Conversion) pour chaque campagne majeure.
  2. Collecte des données : inventorier les métriques de vos 5 dernières campagnes similaires pour établir une baseline de performance fiable.
  3. Analyse de cohérence : confronter chaque KPI à vos objectifs business et aux benchmarks de votre secteur pour identifier les écarts significatifs.
  4. Détection des signaux faibles : repérer les anomalies (ex: un pic de désabonnements sur un segment précis) et chercher la cause qualitative (commentaire, réponse, etc.).
  5. Plan d’action : prioriser 2 à 3 hypothèses d’optimisation claires (ex: « l’objet est trop générique », « le CTA est mal placé ») à valider via des tests A/B.

Lire un rapport n’est donc pas un acte passif de constatation, mais une enquête active. Chaque chiffre est un indice qui, une fois connecté aux autres, vous permet de construire un diagnostic précis et de formuler des hypothèses d’optimisation pertinentes.

La formule infaillible pour calculer le véritable ROI de vos campagnes d’e-mailing

Le Retour sur Investissement (ROI) est le KPI roi, celui qui justifie l’existence même de l’e-mail marketing auprès de la direction. Sa formule de base, (Gains – Coûts) / Coûts, semble d’une simplicité enfantine. C’est précisément cette simplicité qui la rend dangereuse, car la plupart des calculs de ROI sont fondamentalement incomplets, omettant des coûts significatifs et sous-estimant ainsi la véritable rentabilité. L’email marketing est souvent cité comme le canal au ROI le plus élevé, avec des estimations allant jusqu’à 36 € à 42 € pour chaque euro investi, mais ce chiffre spectaculaire dépend d’un calcul rigoureux.

Pour calculer un ROI juste, il faut d’abord définir exhaustivement les « Coûts ». Le coût de la plateforme e-mailing n’est que la partie émergée de l’iceberg. Le plus grand coût caché est le temps humain : les heures passées par les équipes à la stratégie, la rédaction, le design, l’intégration, l’envoi et l’analyse. Il faut également inclure les coûts d’acquisition des contacts (publicité, création de lead magnets), les outils annexes (banques d’images, logiciels de design, services de vérification d’e-mails) et même le coût du nettoyage de la base.

Ce tableau met en lumière les coûts trop souvent oubliés et leur impact potentiel sur le calcul final du ROI.

Coûts souvent oubliés dans le calcul du ROI emailing
Type de coût Exemple Impact moyen sur ROI
Plateforme emailing Abonnement mensuel -5 à -10%
Temps humain Création, gestion, analyse -15 à -30%
Acquisition contacts Publicité, lead magnets -20 à -40%
Outils annexes Design, vérification emails -3 à -8%
Nettoyage base Services de validation -2 à -5%

Du côté des « Gains », l’analyse doit aussi être affinée. Il ne suffit pas de tracer les ventes directes via des codes promo ou des UTMs. Il faut aussi valoriser les micro-conversions (téléchargement d’un livre blanc, inscription à un webinar) et, pour les modèles d’affaires plus complexes, estimer l’impact de l’e-mailing sur la Customer Lifetime Value (CLV). Un e-mail qui fidélise un client et l’incite à acheter de nouveau pendant 3 ans a une valeur bien supérieure à la simple vente qu’il a générée ponctuellement.

En adoptant une approche de « coût total de possession » et une vision large des revenus générés (directs et indirects), vous obtiendrez un ROI peut-être moins spectaculaire sur le papier, mais infiniment plus juste et défendable. C’est le passage d’une métrique de vanité à un véritable outil de pilotage stratégique.

À retenir

  • Les indicateurs quantitatifs seuls sont aveugles ; ils doivent être systématiquement enrichis par une analyse qualitative pour révéler le « pourquoi » derrière les chiffres.
  • Un taux de désabonnement nul n’est pas un signe de succès, mais souvent le symptôme d’une base de données passive et désengagée ou d’un processus de désinscription opaque.
  • Le véritable ROI de l’e-mailing ne peut être calculé sans intégrer les coûts cachés, notamment le temps humain et les frais d’acquisition des contacts, qui peuvent représenter plus de la moitié de l’investissement total.

Le guide de l’analyse de performance en e-mailing : des KPIs à l’optimisation

Arrivé au terme de ce parcours, il est clair que l’analyse de performance en e-mailing est moins un art qu’une science rigoureuse. La maîtrise ne vient pas de la simple observation des KPIs, mais de leur connexion, de leur contextualisation et de l’application de méthodes d’analyse avancées. Pour transformer durablement vos données en croissance, il faut adopter une vision dynamique de la performance, qui va au-delà de la simple campagne ponctuelle.

Une technique puissante pour cela est l’analyse par cohorte. Au lieu d’analyser votre audience comme un bloc monolithique, vous la segmentez en cohortes basées sur leur date d’inscription. En comparant l’engagement de la cohorte de janvier à celui de la cohorte de février sur une période de 3 ou 6 mois, vous pouvez mesurer l’efficacité de votre séquence d’onboarding et détecter une éventuelle érosion de l’engagement dans le temps. Les listes d’e-mails se dégradent naturellement d’environ 22,7% par an, et l’analyse par cohorte est le meilleur outil pour combattre cette attrition.

Analyse par cohorte pour mesurer l’engagement dans le temps

Une entreprise SaaS a constaté en comparant la cohorte d’abonnés de janvier à celle de février que l’engagement des nouveaux inscrits chutait de 45% après seulement trois mois. L’analyse a révélé une séquence de bienvenue défaillante. Après avoir optimisé cette séquence avec du contenu plus pertinent et un rythme mieux adapté, l’engagement à trois mois pour les nouvelles cohortes est remonté à 72%.

Finalement, l’analyse de performance peut être synthétisée dans une matrice de diagnostic simple. En croisant le niveau d’engagement (clics, réactivité) avec le niveau de conversion, vous pouvez rapidement catégoriser vos campagnes et identifier les actions prioritaires. C’est un outil de décision stratégique qui permet de sortir du commentaire KPI par KPI.

Matrice de diagnostic des KPIs email
Engagement Conversion Faible Conversion Élevée
Élevé Problème de landing page ou d’offre
Action : Optimiser le parcours post-clic
Campagne optimale
Action : Répliquer sur d’autres segments
Faible Contenu non pertinent
Action : Revoir ciblage et message
Audience très qualifiée mais petite
Action : Élargir prudemment le segment

Pour que l’analyse débouche sur des résultats concrets, il est fondamental de savoir comment passer des KPIs à une stratégie d'optimisation efficace.

Mettre en place cette approche analytique demande de la discipline, mais les bénéfices sont immenses. Vous ne subirez plus vos résultats ; vous les piloterez. Pour commencer dès aujourd’hui, auditez vos trois dernières campagnes en utilisant la matrice de diagnostic et formulez une hypothèse de test A/B pour la prochaine.

Rédigé par Émilie Durand, Rédactrice spécialisée en automation marketing dotée de 12 ans d’expérience, experte en stratégies de segmentation avancée et nurturing.